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samedi 22 mai 2021

Thierry JONQUET, figure marquante du roman noir français

Thierry JONQUET est écrivain et scénariste. Il est né le 19 janvier 1954 à Paris où il a toujours vécu. Il est décédé le 9 août 2009. Il avait 55 ans.

Ses expériences en tant qu’ergothérapeute auprès de personnes âgées tout d’abord puis d’enfants dans un centre de rééducation, avant de se tourner vers l’enseignement dans une unité en charge de neuropsychiatrie infantile et dans une classe d'éducation spécialisée dans un lycée de la banlieue parisienne, mais aussi son engagement et son militantisme notamment à lutte ouvrière et à la ligue communiste révolutionnaire (LCR), ont sans aucun doute construit et influencé son identité sociale autant qu’artistique, mais aussi alimenté et développé sa sensibilité et sa singularité.

Thierry JONQUET choisit le roman policier pour rendre compte des dysfonctionnements de notre société et des violences sociales qu’elle inflige, pour raconter les choses de la vie, à l’instar d’auteurs comme Jean-Patrick Manchette ou  Pierre Siniac, mais aussi Francis Ryck, Didier Daeninckx, Frédéric H. Fajardie Jean Bernard PouyHervé PrudonJean VautrinMarc Villard… qui ont permis le renouvellement du genre et la création d’un nouveau courant, le néo-polar.

« De livres en livres, Jonquet n’en finissait pas de désigner la barbarie, la bêtise, les guerres fratricides. Il autopsiait notre monde d’aujourd’hui en fabriquant des histoires souvent prémonitoires. Lui qui avait l’allure d’un père peinard, carburait à la révolte et s’engouffrait dans la littérature comme ultime chance de rester debout, digne malgré la folie de notre société. Jonquet mettait en scène les éclopés de la vie, les enfances volées, les corps torturés, les vieillards oubliés, les esprits désemparés. Il dénonçait les lâchetés des politiques, l’aveuglement des bien-pensants et en a irrité plus d’uns. » (Extrait d’un article hommage à Thierry Jonquet de Martine Laval publié dans Télérama en 08/2009)

Il publie tout d’abord sous les pseudonymes de Ramón Mercader (militant communiste espagnol connu pour avoir assassiné Trotski) et de Martin Eden comme le roman éponyme de Jack London.

Mémoire en cage est son premier roman publié en 1982 chez Albin Michel

Qui ? Pourquoi ? Comment ? Voilà les questions que se posait le commissaire Gabelou.

Trois questions pour trois cadavres. Comment en était-on arrivé là ? La fatalité, l’injustice et la vengeance… Cynthia a beau être prisonnière de son fauteuil roulant et de son corps souffrant, elle n’est peut-être pas si débile qu’il y paraît. Sa vie est fichue alors il ne lui reste plus qu’à réussir la mort de l’ordure qui a tout gâché. Mais comment ?






Suivront d’autres romans très noirs, mettant en scène ceux que nos institutions appellent les invisibles, les laissés-pour-compte, ceux que l’on ne veut pas voir, et le quartier de Belleville son lieu de prédilection.

Les orpailleurs publié en 1993 dans la collection série noire de Gallimard

Un corps massacré est découvert dans un immeuble délabré. Non identifiable. On peut juste constater que c'est une jeune fille. Détail macabre, la main droite a été coupée. Le travail est propre, le tueur s'y connaissait. L'équipe de l'inspecteur divisionnaire Rovère est chargée de l'enquête. Une semaine plus tard, un deuxième cadavre est retrouvé. C'est aussi une femme et le rituel de l'assassinat est le même. Dès lors, l'idée d'un meurtrier poursuivant une vengeance prend forme et commence la course contre la montre pour éviter d'autres morts.

Les meurtrissures du corps et de l'âme ne disparaissent jamais complétement ; Thierry Jonquet le prouve avec ce livre qui prend ses racines dans les pans obscurs de l'Histoire. Ce roman présente tous les mécanismes d'une enquête policière vue de l'intérieur.

Les personnages de ce roman ont donné naissance à la série télévisée de 55 épisodes : boulevard du palais.


Mygale publié en 1984 chez Gallimard dans la collection série noire

Ève ? Qui est-elle ? Qui est Richard Lafargue, l'homme qui la promène à son bras dans les soirées mondaines puis l'enferme à double tour dans une chambre ? Pourquoi ce sourire subtil sur les lèvres de la jeune femme et autant de rage si mal contenue sur les traits creusés de son compagnon ? Pourquoi vivre ensemble si c'est pour se haïr avec tant de passion ? Drôle de couple...


Quel incompréhensible passé lie ces deux êtres hors du commun qui se cachent la plupart du temps derrière les murs de leur villa si tranquille ?





En 2011, ce roman a été adapté au cinéma par Pedro Almodovar sous le titre La piel que habito













Moloch publié en 1998 toujours chez Gallimard dans la collection série noire.

Une maisonnette d'apparence banale, dressée au fond d'un terrain vague. Toute une équipe de police hébétée, certains pleurant, d'autres hagards, la gorge nouée par le dégoût, la colère ou la honte, tous à songer à ce qu'ils avaient fait une demi-heure plus tôt avant qu'on ne les appelle, avant de traverser cette ruelle labourée par les pelleteuses, avant de s'approcher de ce pavillon et d'en franchir la porte. Avant. Car rien ne serait plus jamais pareil.










La bête et la belle dans lequel Thierry Jonquet s’amuse avec les figures du conte est publié en 2000 dans la collection série noire de Gallimard

A écouter Léon, qui prend la vie comme elle vient, la mort frappe à tout va dans la banlieue. Il suffit de passer la tête dans l'appartement du Coupable pour se retrouver dans l'autre monde.
Il faut dire qu'il s'y passe des choses étranges : les poubelles s'accumulent derrière les volets clos... De quoi éveiller les soupçons des habitants de la cité des Lilas Bleus et du commissaire Gabelou ! Mais les apparences sont faites pour être trompeuses... Quand vous connaîtrez Léon, vous serez mordu !





Mon vieux publié aux éditions du Seuil en 2004

Élevé dans la misère, Alain Colmont a quand même réussi à devenir prof puis scénariste pour la télé. Mais un jour sa fille, Cécile, a un accident de scooter qui La défigure. Alain, qui l'adore, se ruine pour lui redonner un visage.

À la Courneuve, un vieillard qui titube au milieu de la route à 11 heures du soir est récupéré par la BAC. Pas moyen de savoir son nom, l'inconnu a la maladie d'Alzheimer.

À Belleville, une bande de Clodos se retrouve régulièrement pour boire et se livrer à de petites combines. Cette vie-là, Daniel Tessandier RMiste, n'en veut pas. Mais comment l'éviter lorsqu'on perd son appartement et qu'il n'y a pas de travail 

C'est l'été, — l'été 2003. Étouffante, la chaleur commence à faire des ravages chez les plus démunis, vieillards, malades et rejetés de la vie. Pour Alain Colmont, la canicule risque de tourner au cauchemar.


Thierry JONQUET est également auteur de récits, notamment Jours tranquilles à Belleville

Avec Jours tranquilles à Belleville publié en 1999, Thierry Jonquet décrit Belleville, quartier qu’il habite depuis plus de quinze ans. Il nous montre des instantanés, des croquis de la vie quotidienne, des choses vues et compose un portrait iconoclaste de ce quartier mythique de Paris

Tout commence par une photo : celle, traditionnelle, prise dans la cour d'une école primaire de Belleville, en classe de CP. Une photo qui, à elle seule, raconte bien des histoires. Et pose bien des questions sur l'avenir des enfants qui y figurent .... 


Il  a aussi écrit une dizaine de romans pour les plus jeunes, dont L’homme en noire ou Lapoigne et l’Ogre du métro


Nous terminerons par son dernier roman hélas inachevé Vampires, roman atypique dans lequel nous retrouvons néanmoins les mêmes obsessions, les injustices, les blessures et bien sûr Belleville, mais dans lequel aussi nous découvrons quelque chose de plus léger, une certaine ironie et dérision.

« Chacun sait que les vampires n’existent pas. Et pourtant… Quand vous aurez lu ce farceur de Thierry Jonquet, vous ne serez plus certain de rien. Sinon d’avoir lu un roman d’une ampleur formidable »




Ce roman est adapté en série par Netflix.









Quand un immigré roumain découvre au fond d’un hangar un quidam empalé sur un pieu de bois, le visage tordu de souffrance ante mortem et les entrailles broyées, dans la meilleure tradition des victimes de Vlad Tepes alias Dracula, resurgissent du fond de l’Histoire des terreurs ancestrales.
Et si les vampires n’étaient pas morts ?
La famille Radescu, ces sans-âge au teint blafard, ces noctambules habitants de Belleville, n’ont pas la vie facile. Tuer le temps ne va pas de soi quand celui-ci renaît chaque jour, pour ainsi dire éternellement. Qui s’est jamais intéressé au sort de ces humains sur qui le temps n’a pas de prise ? De ces humains interdits de soleil et alourdis de désirs inassouvis ?
Réintégrer la communauté humaine, en finir avec l’éternité, c’est le but qu’ils se fixent pour tenter d’échapper à cette existence désespérante.







THIERRY JONQUET a également écrit les scénarios de plusieurs téléfilms : 

Résolution 819 réalisé par Giacomo Battiato, sorti en 2008.avec notamment Benoît Maginel et Hyppolyte Girardot, mais aussi plusieurs épisodes de la série Boulevard du Palais ou Alice Nevers, le juge est une femme.




mardi 4 mai 2021

TRAVERSER LA NUIT d'Hervé le Corre

 

Dans ce roman très noir Hervé Le Corre nous fait entendre, dans un Bordeaux pluvieux, froid et tout en nuances de gris, trois voix, celle de Louise, qui a perdu très jeune ses parents et qui a sombré pendant plusieurs années dans la drogue. Harcelée et violentée par un ex, elle survit grâce à son fils Sam, « son petit magicien ».

Jourdan, le flic qui enquête sur des meurtres dont les victimes sont principalement des femmes et des enfants, n’en peut plus. Hanté par cette violence et sa colère il « se sent depuis des mois se vider de toute substance comme une baudruche […] bientôt il ne restera de lui qu’une enveloppe vide, la peau sur les os, sa tête de mort penchée sur une épaule »

Et enfin Christian, l’ancien militaire, cassé par les relations avec une mère toxique, qui reporte sa violence sur les femmes.

Ces trois personnages à la dérive vont se rencontrer jusqu’au drame.


Avis d'un membre du club Rouletabille (Valérie L) :

Tout en tension et en émotion Traverser la nuit est un roman bouleversant et sombre sur la difficulté de quitter sa condition, sur le temps qui passe et qui use, sur le présent hanté par le passé.

C’est un coup de cœur pour ce roman porté par le regard malgré tout plein d’humanité et l’écriture d’Hervé le Corre.


samedi 1 mai 2021

LA VALSE DES TULIPES d'Ibon MARTIN

 

La valse des tulipes est un très bon polar, premier texte traduit en français d’Ibon Martin, qui se passe au Pays Basque espagnol dans l’estuaire d’Urdaibai où plusieurs meurtres spectaculaires sont perpétrés contre des femmes, avec comme signature des tulipes rouges.


Avis d'un membre du club Rouletabille (Valérie L) : 

Polar addictif, porté par les paysages de cette région, l’atmosphère qui s’en dégage et des personnages bien incarnés, particulièrement l’équipe chargée de l’enquête dirigée par Ann Cestero, auquel le lecteur s’attache d’emblée.

L'auteur nous parle de la situation des femmes, de la violence des hommes et nous plonge dans le passé, s'inspirant de faits réels impliquant l’église catholique soutenue par le pouvoir en place.

Passionnant !